Auteur : Agence Science Presse - Marion Spée
Pour estimer l’âge d’un chien en « années humaines », il existe un vieil adage qui dit qu’il faut multiplier par sept l’âge réel du chien. Est-ce que ça tient la route, s’est demandé le Détecteur de rumeurs ?
« Cette croyance vient probablement de l’époque où les chiens avaient une espérance de vie d’une douzaine d’années. Et puisqu’on estimait celle des humains à plus de 70 ans, un facteur sept permettait de passer de l’un à l’autre avec un chiffre rond », explique Matthias Kohlhauer, vétérinaire et enseignant en pharmacologie à l’École nationale vétérinaire d’Alfort, en France. « Mais aujourd’hui, avec les traitements qu’on peut appliquer aux animaux, on peut avoir des chiens qui vivent jusqu’à 20 ans. La règle ne tient plus. »
Dans une étude parue le 1er juillet dernier dans la revue Cell Systems, des chercheurs américains se sont d’ailleurs intéressés au vieillissement du chien. À partir d’un échantillon de 104 labradors, ils ont établi une nouvelle formule pour traduire l’âge canin en âge humain. Ils soulignent que les chiens offrent un bon modèle pour de telles comparaisons car une grande partie de leur environnement, de leur régime alimentaire et de leur exposition aux produits chimiques, est similaire au nôtre.
Pour parvenir à cette formule, les auteurs de l’étude se sont penchés sur l’évolution de groupes méthyles, des marques chimiques qui s’associent à l’ADN au cours du temps de manière prédictible, aussi bien chez l’humain que chez le chien. « Le principe, explique Matthias Kohlhauer, c’est que les mammifères vivent des étapes de développement similaires: naissance, petite enfance, jeunesse, puberté, âge adulte. À chacune de ces étapes, des marques chimiques sont laissées sur l’ADN comme une trace de vécu. » Autrement dit, l’étude de cette méthylation permet de donner un âge biologique aux organismes. C’est un peu comme les rides ou la couleur des cheveux qui donnent un indice sur l’âge d’une personne.
En se basant sur ces marqueurs, les chercheurs ont donc établi cette formule, qui tient compte des tranches d’âge respectives (enfance, adolescence, maturité, vieillesse) de l’humain et du chien. Par exemple, un chiot d’environ huit semaines a approximativement l’âge d’un bébé de neuf mois. À ce moment-là, les deux petits sont au stade du développement de leurs dents.
Mais par la suite, la progression du vieillissement diffère grandement chez l’un et l’autre. Autrement dit, les étapes de développement ne se passent pas au même rythme et il n’y a pas de relation linéaire entre l’âge des chiens et celui des hommes : les chiens vieillissent très rapidement au début de leur vie, un chien d’un an a le même vieillissement qu’un humain d’une trentaine d’année. Puis, ça stagne à partir de l’âge de 7 ans. D’ailleurs, selon Matthias Kohlhauer, il n’est pas étonnant de voir un chien développer un cancer dès 7 ans, puisque selon la formule, ça équivaut à 62 ans chez l’humain.
Notons que le fait que l’étude ait été menée avec des labradors seulement pourrait amener des chercheurs à poursuivre leurs travaux avec d’autres races de chiens, pour tester la possibilité de généraliser la formule.