/ La recherche au quotidien / Vers de nouvelles thérapies antifongiques pour contrer les agents ...
Capsules

Vers de nouvelles thérapies antifongiques pour contrer les agents pathogènes fongiques multirésistants

Les infections fongiques représentent un défi de plus en plus grand pour la santé publique, notamment en raison de l’émergence du Candida auris, une espèce souvent contractée dans les hôpitaux et hautement résistante aux antifongiques de première ligne. Cette menace majeure, identifiée par l’OMS, met en évidence le besoin pressant de nouvelles solutions thérapeutiques, alors que les choix de traitement sont limités. Adnane Sellam, chercheur à l’Université de Montréal, cherche à mieux comprendre les mécanismes de la virulence fongique, afin d’élaborer des traitements plus efficaces et plus sécuritaires contre ces infections opportunistes qui affectent particulièrement les patients immunodéprimés – comme ceux qui sont atteints du VIH ou du cancer – et les personnes âgées. Pour maximiser ses chances de succès dans la lutte contre ces infections, son approche interdisciplinaire combine la génomique, la microbiologie et la chimie médicinale.

Ses recherches comportent trois axes principaux. Le premier vise à décrypter les moyens qui permettent aux champignons pathogènes, en particulier le Candida albicans, d’infecter un organisme et de s’y reproduire, afin d’identifier des cibles thérapeutiques potentielles. Le deuxième axe consiste à rechercher de nouvelles molécules antifongiques, notamment par le criblage à haut débit de chimiothèques, une technique qui teste rapidement en parallèle des milliers de composés chimiques. Ces deux axes de recherche ont déjà mené à des découvertes majeures, notamment à la mise en évidence d’une molécule efficace in vitro contre le Candida albicans et le Candida auris, et la validation préclinique de nouveaux antifongiques comme les aryl-carbohydrazides et les salicylanilides halogénés.

Enfin, le troisième axe explore l’utilisation de bactéries intestinales antagonistes du Candida albicans comme approche thérapeutique. L’hypothèse est que certaines bactéries de la flore intestinale pourraient inhiber la croissance de ce champignon et ainsi, prévenir les infections chez les patients vulnérables. Cette nouvelle perspective quant aux interactions entre microbiote et infections fongiques pourrait permettre le développement de nouvelles stratégies thérapeutiques, notamment l’utilisation de probiotiques antifongiques. De plus, les travaux ont révélé que certains champignons commensaux associés à la flore intestinale sécrètent des molécules aux fonctions endocrines, ouvrant ainsi une nouvelle voie de recherche sur les liens entre microbiote et maladies inflammatoires.

 

Références

  • Tebbji, F., Menon A.C.T., Khemiri, I., St-Cyr, D., Vincent, A.T., et Sellam, A. (2024). Small molecule inhibitors of fungal ∆(9) fatty acid desaturase as antifungal agent against Candida auris. Frontiers in Cellular and Infection Microbiology, vol. 14.  https://doi.org/10.3389/fcimb.2024.1434939
  • García, C., Tebbji, F., Daigneault, M., Liu, N., Köhler, J.R., Allen-Vercoe, E., et Sellam, A. (2017). The human gut microbial metabolome modulates fungal growth via TOR signaling pathway. mSphere, 2(6).  doi : 10.1128/mSphere.00555-17
  • Henry, M., Khemiri, I., Tebbji, F., Abu-Helu, R., Vincent, A., et Sellam, A. (2024). Manganese homeostasis shapes fitness and virulence of Candida albicans. mSphere, 9(3). doi : 10.1128/msphere.00804-23
  • Henry, M., Burgain, A., Tebbji, T., et Sellam, A. (2022). Transcriptional control of hypoxic hyphal growth in the fungal pathogen Candida albicans. Frontiers in Cellular and Infection Microbiology, vol. 11. doi : org/10.3389/fcimb.2021.770478