L’évolution de l’informatique et d’Internet a ouvert de nouvelles possibilités aux partis politiques et transformé les campagnes électorales. Mais l’impact de ces technologies numériques sur les résultats électoraux est-il aussi grand qu’on le croit?
Fenwick McKelvey, chercheur en communication à l’Université Concordia, s’est intéressé à l’utilisation des ordinateurs lors des élections américaines des années 1960 aux années 1990, ainsi qu’à l’impact du numérique sur les campagnes contemporaines.
Le chercheur a étudié des pièces d’archives et mené des entrevues avec des organisateurs et des organisatrices politiques, des consultants et des consultantes, ainsi que des militantes et des militants aux États-Unis. Ce regard large lui a permis de constater que le progrès des technologies numériques influe sur la politique depuis près de 80 ans.
Ses recherches montrent une certaine exagération quant à l’impact des technologies sur le résultat des campagnes politiques. Les victoires récentes de Barack Obama et de Donald Trump lors des élections présidentielles américaines ont souvent été attribuées à de meilleures techniques de ciblage des électeurs et des électrices sur les réseaux sociaux. On disait la même chose du programme Systèmes d’information politique (PINS) lors de la campagne de Ronald Reagan, en 1984.
Fenwick McKelvey prévient contre la tentation de croire que la technologie constitue un facteur déterminant des succès ou des revers en politique. Selon lui, ce discours simpliste nuirait à la réflexion sur les causes profondes des choix politiques des électeurs et des électrices. Par exemple, la désillusion d’une partie des populations américaine et canadienne quant aux promesses non réalisées de l’État-providence alimente la fracture actuelle du modèle des démocraties libérales. Cette tension, très présente sur les réseaux sociaux, existait toutefois dans la société depuis longtemps. Les technologies peuvent amplifier ou instrumentaliser des dynamiques sociales et politiques, mais ce sont ces dernières qui, finalement, ont une influence sur les choix politiques.
Référence :
McKelvey, F. et Piebiak, J. (2019). Does the Difference Compute? Data-Driven Campaigning in Canada. https://doi.org/10.59962/9780774861175-014 Dans M. Lalancette, V. Raynauld, et E. Crandall (Eds.), What’s Trending in Canadian Politics? – Understanding Transformations in Power, Media, and the Public Sphere, UBC Press, 194-215.