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Détecteur de rumeurs

Non, le vaccin ne brillera pas dans le noir

Les articles du Détecteur de rumeurs sont rédigés par des journalistes
scientifiques de l'Agence Science-Presse. Les Fonds de recherche du Québec et
le Bureau de coopération interuniversitaire sont partenaires du Détecteur de rumeurs.

Auteur : Agence Science Presse - Pascal Lapointe

Certaines affirmations sur le vaccin anti-COVID semblent tellement étranges que le Détecteur de rumeurs s’attend à ce qu’elles meurent d’elles-mêmes. Ainsi, une affirmation sur une « dangereuse » enzyme appelée luciférase, court depuis au moins décembre 2020 et relie le vaccin… à Lucifer.

Ce qui est vrai : il existe dans la nature des enzymes appelées « luciférases ». Elles sont derrière le phénomène de « bioluminescence », c’est-à-dire la capacité de certains êtres vivants (comme les lucioles) à briller dans le noir. La luciférase déclenche l’oxydation d’une molécule appelée la luciférine, ce qui produit de la lumière. Ces enzymes ont été utilisées dans des recherches sur le coronavirus, comme elles l’avaient été dans de nombreuses autres recherches auparavant: un virus qui « brille » a en effet son utilité lorsque des chercheurs veulent observer en laboratoire comment évolue le virus, ou comment évolue une séquence de ses gènes. Les mots luciférase et luciférine ont été choisis par leur découvreur, le médecin français Raphaël Dubois, à la fin du XIXe siècle.

Ce qui est faux : cette enzyme n’a toutefois pas été utilisée dans les recherches sur le vaccin. Et elle n’est pas dans la liste des ingrédients des vaccins. Quand bien même y serait-elle, elle ne pourrait pas faire briller votre bras comme l’ont prétendu certains messages ni servir de « marqueur » lisible par un « scanner »: le contenu d’un vaccin est éliminé par notre corps en quelques jours.

Ce qui est douteux : bien que le Détecteur de rumeurs ne puisse pas prouver qu’un personnage surnaturel du nom de Lucifer n’existe pas, il semble douteux qu’il ait donné son nom à une enzyme.

Un message d’une « journaliste » du réseau de télé américain Newsmax, qui a depuis été effacé.

Les 3 astuces du Détecteur de rumeurs

1) On appelle « recherche latérale » l’astuce consistant à sortir d’un site pour vérifier une info de base. Par exemple, si on ignore ce qu’est une « luciférase » (ce qui est probablement le cas de la majorité des gens), il peut être sage de faire une recherche Google, qui nous amènera entre autres à une page Wikipédia.

2) Un message Facebook, un mème, une vidéo personnelle, qui prétendent avoir découvert quelque chose d’aussi gros, mais ne citent aucune source, devraient être regardés avec la plus grande suspicion. Ce qui veut dire, là encore, une recherche latérale: outre la définition de la luciférase, cette recherche permettra de découvrir rapidement que beaucoup d’études ont été publiées sur la luciférase, dans bien des domaines de la biologie, depuis très longtemps.

3) Accessoirement, une telle recherche latérale, avec des mots (en français ou en anglais) comme luciferase vaccine COVID, permettra aussi de découvrir des textes de nos collègues vérificateurs de faits, par exemple celui-ci de l’Associated Press remontant déjà à avril dernier, ou celui-ci de Reuters.