Depuis quelques années, alors que les neurosciences nous permettent de mieux comprendre la manière dont le cerveau traite l’information, on voit apparaître des méthodes pédagogiques qui visent à appliquer ces connaissances à l’enseignement. Cependant, les processus de la neuroéducation et les retombées sociales de celle-ci restent peu connus.
Il serait avantageux de favoriser un dialogue critique entre les chercheurs en neurosciences et les différents acteurs qui développent les programmes éducatifs.
Suparna Choudhury, chercheuse en psychiatrie transculturelle et sociale à l’Université McGill, a étudié le développement des approches de neuroéducation au Canada, au Royaume-Uni et aux États-Unis au moyen d’observations en classe et d’entrevues avec des élèves, des membres du personnel enseignant, des directions d’école, des responsables de politiques éducatives et des chercheurs en éducation.
Elle a constaté que la volonté d’enseigner aux jeunes en s’accompagnant de gestes des mains et en utilisant certains mots-clés pour stimuler leur cerveau et gérer leurs émotions est très présente, notamment aux États-Unis. Une version séculaire du concept de « pleine conscience » – issu du bouddhisme – connaît aussi une grande popularité en raison des avantages potentiels que présente sur l’apprentissage le fait d’être dans le présent, de bien respirer, de gérer ses émotions, etc.
La chercheuse a aussi noté que plusieurs mythes découlant d’une mauvaise compréhension des découvertes des neurosciences influent sur des programmes de neuroéducation. Par exemple, plusieurs enseignants croient – à tort – que certains élèves utilisent l’hémisphère gauche de leur cerveau et d’autres le droit pour apprendre, et qu’on devrait adapter l’enseignement à cette caractéristique.
Les travaux de Suparna Choudhury scrutent l’intérêt d’utiliser les neurosciences en éducation et en gestion des émotions, ainsi que les implications éthiques et culturelles de cette tendance. Ils démontrent qu’il est primordial de mieux interpréter les avancées des neurosciences, afin de les appliquer adéquatement à l’enseignement. En ce sens, ils suggèrent qu’il serait avantageux de favoriser un dialogue critique entre les chercheurs en neurosciences et les différents acteurs qui développent les programmes éducatifs.
Les résultats obtenus soulignent aussi qu’il serait judicieux d’examiner les limites de ces approches, qui tendent à réduire l’éducation à un défi individuel et à négliger les aspects sociaux, culturels et politiques qui peuvent, eux aussi, favoriser ou nuire à l’apprentissage.