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Les sciences et le génie : pas juste une affaire de gars

Au cégep, Ève Langelier rêvait de dessiner des avions. Inspirée par la passion de son père pour le pilotage, elle aspirait à les concevoir. À l’université, elle s’est donc inscrite au baccalauréat en génie mécanique. La jeune femme s’est alors retrouvée plongée dans un « milieu de gars ».  « 90 % des étudiants étaient masculins, et la situation n’a pas changé aujourd’hui », raconte la professeure au Département de génie mécanique de l’Université de Sherbrooke. Une réalité qui se traduit également dans la composition du corps enseignant de la faculté, qui compte huit femmes sur une centaine de professeurs.

Plusieurs domaines du génie peinent toujours à attirer les femmes. En tant que titulaire de la Chaire du CRSNG pour les femmes en sciences et génie au Québec, Ève Langelier s’est donné pour mission de démystifier ces milieux boudés par la gente féminine. Avec ses séries de vidéos Changer le monde au féminin et D’une femme à une autre, la Chaire souhaite présenter des modèles de rôles et déconstruire les idées préconçues et les stéréotypes véhiculés sur les sciences et le génie.

La face cachée du génie mécanique

Mais pourquoi le génie mécanique, particulièrement, rebute-t-il autant les femmes ? Ève Langelier a notamment remarqué qu’au primaire, les enseignantes, qui sont majoritaires, sont souvent peu à l’aise avec la technologie. Leur anxiété déteint-elle sur leurs petites élèves ? Au début du secondaire, l’intérêt des filles envers les mathématiques et l’univers technologique est à son plus bas. Question de culture ? « Les filles ont plus d’attirance pour les domaines qui aident les gens », constate Ève Langelier, qui a d’ailleurs fait sa maîtrise, son doctorat et son postdoctorat dans une branche plus « humaine » du génie mécanique. En effet, après son baccalauréat, l’ingénieure a délaissé les avions pour la bioingénierie, qui applique des concepts d’ingénierie à la médecine, à la biologie et au sport afin d’améliorer la qualité de vie des gens ou les performances sportives, par exemple. « Ce domaine n’est même pas connu des jeunes au cégep. La plupart associent le génie mécanique à l’automobile, alors que c’est plutôt l’étude du mouvement », précise-t-elle.

Changer les mentalités

Ève Langelier souhaite également que les activités de la Chaire contribuent à améliorer le bien-être des femmes qui choisissent les sciences et le génie. Elle dirige donc un groupe de discussion sur l’impact des expériences de stages. « Dans un milieu d’hommes, ce n’est pas toujours facile. Je me suis déjà fait refuser un stage simplement parce que j’étais une femme. Ça peut en refroidir certaines, qui changeront alors de parcours », souligne-t-elle. L’ingénieure croit fermement qu’il ne faut pas s’attarder au genre d’une personne, mais plutôt aux compétences qu’elle apporte à une équipe. « La diversité crée un milieu plus créatif, alors, pourquoi s’en priver ? », poursuit-elle. La Chaire du CRSNG mène d’ailleurs un projet pilote de formation pour sensibiliser les comités d’embauche universitaires aux avantages de la diversité des genres, mais aussi aux préjugés inconscients entourant les offres d’emploi, l'évaluation des candidatures et l'embauche selon le genre. « Pour changer les mentalités, il faut d’abord changer les façons de faire », croit Ève Langelier.


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