Auteur : Agence Science Presse - Catherine Crépeau
Les articles du Détecteur de rumeurs sont rédigés par des journalistes
scientifiques de l'Agence Science-Presse. Les Fonds de recherche du Québec et
le Bureau de coopération interuniversitaire sont partenaires du Détecteur de rumeurs.
Le déploiement de la 5G a suscité de nombreuses allégations quant aux risques pour la santé humaine. L’une des plus surprenantes est que la technologie causerait le diabète. Le Détecteur de rumeurs a voulu savoir pourquoi on a pu imaginer ce lien.
L’origine de la rumeur
On l’appelle 5G parce qu’elle est la 5e génération de télécommunications mobiles. Elle permet d’augmenter la vitesse de transmission des données, de réduire le temps d’accès au réseau et d’accroître le nombre d’appareils pouvant se connecter à un même réseau en même temps. Elle utilise deux types de radiofréquences : les premières sont comparables à celles qu’on retrouve dans les « générations » précédentes, alors que les secondes, les ondes millimétriques, sont à plus haute fréquence et dotées d’une plus grande intensité.
Cependant, cette intensité plus élevée ne les rend pas plus dangereuses pour le corps humain : elles font toujours partie de la catégorie des ondes dites « non ionisantes », ainsi nommées parce qu’elles ne changent pas la charge électrique des ions lors de leurs passages à travers la matière et ne peuvent donc pas provoquer de mutations dans notre bagage génétique.
Tout au plus a-t-on établi que ces ondes —bien avant la 5G— peuvent augmenter la température des tissus de la peau —ce qu’on appelle un « effet thermique ». Cet effet des ondes électromagnétiques est même calculé depuis longtemps par les autorités sanitaires afin que les appareils respectent des seuils maximaux.
En ce qui concerne la possibilité d’effets autres que thermiques, une revue systématique parue en 2019 révélait qu’environ 80% des études utilisant des fréquences d’ondes similaires à celles de la 5 G en avaient détecté sur des êtres vivants, et 58% sur des cellules (in vitro). Mais il n’existait pas de relation consistante entre la puissance du signal, la durée de l’exposition, les fréquences en jeu et les effets mesurés. Et la majorité de ces études ne respectent pas les standards de qualité nécessaires pour en tirer des conclusions satisfaisantes. Une autre revue de littérature réalisée en 2016 avait déjà conclu que plus les études sont réalisées avec rigueur, moins il y a d’effets détectés.
Quel lien avec le diabète ?
En 2014, une étude publiée dans Environmental Toxicology and Pharmacology concluait que l’exposition de rats aux radiofréquences des appareils Wi-Fi induisait des troubles métaboliques et un état semblable au diabète par une altération de la réponse oxydative. Mais l’étude visait avant tout à démontrer que l’huile d’olive amenuisait les effets de cette exposition.
Au Canada en 2008, une étude auprès de quatre diabétiques de type 1 et de type 2 concluait que l’électricité générée par les équipements électroniques et les appareils sans fil pouvait contribuer à l’élévation de la glycémie chez les diabétiques et les prédiabétiques. Outre que l’échantillon était minuscule, l’auteure était une toxicologue qui milite pour une réduction de notre exposition aux champs électromagnétiques.
Mais d’autres études sont allées dans le sens contraire, en avançant que l’exposition à des champs magnétiques et électriques statiques combinés pourrait améliorer la sensibilité à l’insuline. Rappelons que c’est justement la production d’insuline qui est problématique chez les diabétiques : chez les diabétiques de type 1, le pancréas ne produit pas d’insuline, alors que chez les diabétiques de type 2, la quantité produite est insuffisante ou mal utilisée par le corps.
Or, des chercheurs de l’Université de l’Iowa, qui ont exposé des souris diabétiques à de tels champs pendant quelques heures par jour, ont constaté une normalisation de la glycémie (le taux de sucre dans le sang) et de la résistance à l’insuline. Ces effets, qui seraient donc bénéfiques, sont apparus dans les trois jours suivant l’exposition, sans effets contraires indésirables.
Ces chercheurs ont également traité des cellules hépatiques humaines avec des champs magnétiques et électriques statiques pendant six heures et ont observé une augmentation du glycogène, un marqueur de substitution de la sensibilité à l’insuline, suggérant la possibilité d’un effet antidiabétique similaire chez l’homme.
Ces données laissent donc entendre que ces champs pourraient constituer un angle de traitement du diabète. À condition que les résultats obtenus se transposent chez l’humain, ce qui est pour l’instant une grosse inconnue.
Il est aussi possible que ça ne s’applique pas à tous les types d’ondes.
Verdict
Il est possible que les ondes et les champs magnétiques influent sur la glycémie et la production d’insuline, mais les données scientifiques semblent aller dans les deux sens, en plus d’être nettement insuffisantes pour qu’on puisse déterminer quel pourrait être le lien de cause à effet.