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Le rôle méconnu du muscle des voies respiratoires dans l’asthme

Depuis plus de deux décennies, Ynuk Bossé, chercheur au Centre de recherche de l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumonie du Québec (IUCPQ), s’intéresse au muscle lisse qui entoure les voies respiratoires, souvent perçu comme responsable des symptômes de l’asthme. En effet, en se contractant, ce muscle rétrécit les voies respiratoires. C’est pourquoi il est la cible des bronchodilatateurs qui sont prescrits pour le relaxer, afin de maximiser la ventilation. Or, cette structure complexe et hautement spécialisée semble remplir un rôle plus nuancé qu’il ne l’est à première vue. Ce paradoxe a amené le chercheur à se pencher sur deux grands axes : mieux comprendre la fonction normale du muscle lisse et explorer sa contribution réelle à l’asthme. L’équipe de recherche d’Ynuk Bossé a ainsi utilisé des bains d’organes pour étudier la contractilité du muscle lisse de tissu pulmonaire humain issus de la biobanque de l’IUCPQ et de modèles murins de l’asthme.

Les résultats obtenus par l’équipe d’Ynuk Bossé bouleversent les conceptions actuelles. Ainsi, au lieu d’aggraver l’asthme, le tonus du muscle lisse jouerait un rôle protecteur chez les personnes asthmatiques, en préservant l’homogénéité du fonctionnement pulmonaire et en limitant la fermeture excessive des voies respiratoires en réponse à l’inflammation et à l’accumulation de mucus. Cette nouvelle compréhension ouvre la voie à une réévaluation du rôle du muscle lisse dans l’asthme et pourrait inspirer des approches thérapeutiques inédites visant à restaurer ses fonctions protectrices plutôt qu’à les inhiber.

Deux partenariats industriels ont enrichi cette démarche : l’un avec Boston Scientific, pour tester une intervention clinique (la thermoplastie bronchique) chez des patients asthmatiques sévères, et l’autre avec Scientific Respiratory Equipment (SCIREQ), pour développer une technologie de mesure fine de la constriction des petites voies respiratoires. Cet outil, le physioLens, est maintenant commercialisé et offre de nouvelles possibilités pour la recherche préclinique.

 

Références

  • Bossé, Y., Chin, L. Y. M., Paré, P. D., et Seow, C. Y. (2009). Adaptation of airway smooth muscle to basal tone: Relevance to airway hyperresponsiveness. American Journal of Respiratory Cell and Molecular Biology, 40(1), 13-18.
    DOI:  https://doi.org/10.1165/rcmb.2008-0150OC
  • Gazzola, M., Lortie, K., Henry, C., Mailhot-Larouche, S., Chapman, D. G., Couture, C., Seow, C. Y., Paré, P.-D., King, G. G., Boulet, L.-P., et Bossé, Y. (2017). Airway smooth muscle tone increases airway responsiveness in healthy young adults. American Journal of Physiology–Lung Cellular and Molecular Physiology, 312(3), L348-L357.
    DOI: https://doi.org/10.1152/ajplung.00400.2016
  • Gazzola, M., Boucher, M., Henry, C., et Rojas-Ruiz, A. (2024). Airway smooth muscle tone curbs hyperresponsiveness in experimental asthma [Preprint, bioRxiv].
    DOI: https://doi.org/10.1101/2024.07.05.602208
  • Bossé, Y. (2025). The airway smooth muscle and the pipe dream of better bronchodilators. Canadian Journal of Physiology and Pharmacology, 103(1), 2-11.
    DOI: https://doi.org/10.1139/cjpp-2024-0277