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Le génie minéral au féminin

Depuis des années, Carmen Mihaela Neculita, professeure à l’Institut de recherche en mines et environnement UQAT-Polytechnique de l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT), s’efforce d’améliorer le traitement des eaux minières contaminées. Elle a développé une expertise unique qui la démarque sur la scène scientifique et elle fait partie de la minorité de chercheuses dans ce domaine. Mais ce n’est pas ce statut particulier qui la rend la plus fière. C’est plutôt cette lettre reçue d’une ancienne étudiante coréenne qui la remercie de l’avoir encouragée à faire un doctorat, qu’elle a poursuivi à Harvard, aux États-Unis. Ce message est l’ultime récompense pour cette ingénieure de formation qui a gravi les échelons de la recherche pour pouvoir transmettre sa passion.

Faire sa place

Carmen Neculita est sans contredit un modèle de persévérance. Elle entame son parcours scientifique en Roumanie, où elle obtient son diplôme d’ingénieure. Elle pratique ensuite son métier dans une entreprise minière, puis dans le réseau de l’Agence de protection de l’environnement. « À cette époque, sur 600 employés à la mine, il y avait seulement 60 femmes », se rappelle l’ingénieure. Après 10 ans sur le marché du travail, elle ressent le désir de partager ses connaissances et sa passion. Elle rêve d’enseigner et fait donc un retour aux études… dans un autre pays et dans une autre langue. Elle s’inscrit à Polytechnique Montréal pour faire une maîtrise et un doctorat en génie minéral qu’elle terminera en 2008, pour ses 40 ans !

À un âge où beaucoup sont bien ancrés dans leur carrière, Carmen Neculita entreprend la sienne en Corée du Sud, à l’Institut supérieur coréen des sciences et technologies (KAIST). Elle y supervise pendant trois ans des diplômés en génie civil et environnement. Encore une fois, elle se retrouve entourée d’hommes; seulement trois femmes enseignent dans ces programmes : elle-même, une Américaine et une Coréenne ! « Là-bas, j’ai senti pour la première fois une différence entre les hommes et les femmes », relate la scientifique. Elle devient alors le mentor de nombreuses étudiantes qu’elle encourage à poursuivre leurs études malgré les défis que leur pose leur culture.

En 2011, elle revient au Québec pour diriger la Chaire de recherche du Canada sur le traitement passif des eaux minières contaminées à l’UQAT. L’ingénieure a en effet développé des connaissances recherchées sur une approche qui utilise une tranchée ou un réservoir creusé rempli de matériaux naturels pour filtrer l’eau contaminée des mines abandonnées. La scientifique s’intéresse également au traitement du drainage minier en milieu nordique, où température froide et salinité élevée due aux agents de déglaçage représentent un défi.

Conjuguer famille et carrière

Au Québec, le génie minéral attire de plus en plus de femmes, contrairement à ce qui se passe en Corée. Par contre, leur proportion chute lorsqu’elles avancent dans leur cursus universitaire. La professeure Neculita reçoit souvent dans son bureau des jeunes filles qui songent à abandonner les études supérieures pour fonder une famille. « Je les encourage à suivre leur passion en impliquant davantage leur entourage, souligne l’ingénieure. Une femme ne devrait pas avoir à choisir entre vie de famille et carrière universitaire. »


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