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La parole des jeunes transgenres

gender_apsansfaconLe parcours des jeunes transgenres est souvent entravé par des structures sociales peu accueillantes. Par ses recherches et son militantisme, Annie Pullen Sansfaçon s’efforce de faire entendre la voix de ces jeunes et de leur famille, afin de corriger ces injustices.

« Je ne mène pas des recherches “sur” les personnes transgenres, mais avec elles », précise d’entrée de jeu la chercheuse de l’École de travail social de l’Université de Montréal. Ses projets sont menés en coconstruction avec des personnes transgenres qui sont des participantes plutôt que de simples « sujets d’études ».

Traditionnellement, les recherches menées auprès des personnes transgenres tendent à porter sur les aspects personnels de leur passage d’un genre à un autre. Pourtant, leur parcours ne peut se comprendre qu’en lien avec les structures sociales. Annie Pullen Sansfaçon a donc tourné son regard vers les conditions sociales et les grandes structures, afin de mettre en lumière ce qui favorise ou, au contraire, défavorise l’épanouissement des jeunes transgenres. Voilà précisément l’objet d’une recherche qu’elle mène présentement en partenariat avec plusieurs acteurs et organismes de la communauté trans de Montréal, pour comprendre les expériences des jeunes transgenres de 15-25 ans au Québec.

Elle applique une méthodologie inspirée de l’approche autogérée, développée en grande partie par l’un de ses mentors, David Ward, de l’Université De Montfort, en Grande-Bretagne, sous la direction duquel elle a rédigé sa thèse de doctorat. « Il s’agit d’une intervention de groupe visant à favoriser une reprise du pouvoir par les participants grâce à une prise de conscience des conditions structurelles qui les oppriment », résume la chercheuse.

Une approche novatrice, peu utilisée jusque-là auprès des personnes transgenres. Ces dernières, fortement marginalisées et aux prises avec un haut taux de suicide, bénéficient grandement d’une approche très inclusive et respectueuse qui vise à leur accorder la parole.

Penser et agir

Elle-même mère d’une enfant transgenre, Annie Pullen Sansfaçon est bien placée pour comprendre les difficultés auxquelles ces enfants et leur famille sont confrontées au quotidien. Celle qui admet avoir choisi le travail social parce qu’elle avait envie d’aider joint donc le geste à la parole.

Cofondatrice de l’organisme d’entraide Enfants transgenres Canada, elle a reçu avec sa fille, Olie Pullen, le prix Droits et Libertés 2016 de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, en reconnaissance de leur travail en faveur des droits des enfants trans. Le militantisme de cette chercheuse a aussi contribué au dépôt du projet de loi 103 visant la lutte contre la transphobie et la réduction des obstacles administratifs qui nuisent à la reconnaissance du statut de personne trans, comme le changement de la mention du sexe sur l’acte de naissance.

Annie Pullen Sansfaçon juge important que la recherche universitaire se penche sur la situation des personnes transgenres, mais elle aimerait aussi qu’un plus grand nombre d’entre elles réussissent un parcours universitaire et deviennent elles-mêmes chercheuses. Encore là, il faudra travailler sur le milieu pour favoriser cette réussite. Les personnes transgenres subissent des vexations quotidiennes comme les salles de bain genrées ou le refus des administrations d’utiliser les nouveaux prénoms et pronoms pour les désigner. À l’université comme ailleurs, il reste du travail à faire pour favoriser l’épanouissement des personnes transgenres.


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