Depuis une cinquantaine d’années, les consultations pour infertilité ont doublé. Chez les hommes, le nombre de spermatozoïdes chez les hommes a baissé de plus de 50 %. Parallèlement, les cas de cancer, et par conséquent le recours aux chimiothérapies, augmentent en raison du vieillissement et de l’augmentation de la population. Les chimios pourraient-elle participer au déclin de la fertilité masculine?, s’est demandé Géraldine Delbès, chercheuse à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS).
Chez les hommes, le nombre de spermatozoïdes a baissé de plus de 50 %.
Son étude pilote suggère que les chimiothérapies peuvent altérer la concentration et qualité des spermatozoïdes. De façon originale, elle montre que le risque d’infertilité masculine double, et ce, même si le cancer est diagnostiqué durant l’enfance. Elle vient ainsi ébranler les croyances scientifiques selon lesquelles les cellules des testicules seraient en dormance avant la puberté, et donc peu perturbées par l’environnement.
Cette experte en toxicologie de la reproduction et ses collègues de l’Université McGill et du CUSM ont analysé la concentration et la qualité des spermatozoïdes chez 13 survivants d’une leucémie ou d’un lymphome pédiatrique diagnostiqués avant ou après la puberté, et les ont comparées à celles de 12 hommes sans antécédents de cancer.
Il en ressort que 33 % des survivants traités par chimiothérapie avaient très peu de spermatozoïdes, voire aucun, suggérant une infertilité prononcée à complète : un pourcentage deux fois plus élevé que pour la population masculine générale, dont 16-17 % possède une faible concentration de spermatozoïdes.
Les scientifiques ont aussi remarqué que les anthracyclines, des anticancéreux pourtant considérés comme peu nocifs pour la fertilité, provoquent des anomalies dans l’ADN des spermatozoïdes. Ceci pourrait expliquer certains cas d’infertilité chez plusieurs survivants du cancer. Selon Géraldine Delbès, ces anomalies peuvent affecter l’embryon, causant des défauts d’implantation ou des fausses couches récurrentes.
La chercheuse aimerait trouver des manières de protéger les cellules reproductrices durant les traitements de chimiothérapie, et ce, surtout chez les garçons prépubères, dont il est impossible de congeler les spermatozoïdes pour utilisation future.
En attendant d’autres études sur de plus grandes cohortes, Géraldine Delbès recommande aux médecins de prendre en compte les traitements de chimiothérapie pour expliquer certains cas d’infertilité.