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Exposer la réussite des femmes en recherche

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Au Québec, le baccalauréat en informatique compte quelque 30 % de femmes. Mais au doctorat, il n’y en a plus que 15 %. En génie, la gente féminine est également peu nombreuse et représente 20 % des étudiants. Joelle Pineau, chercheuse en intelligence artificielle et professeure au Département d’informatique de l’Université McGill, déplore que ces chiffres n’aient pas beaucoup changé depuis le début des années 2000 au moment où elle terminait ses études doctorales en robotique.

Un manque de modèles

Qu’est-ce qui rebute tant les femmes et les empêche d’intégrer ces domaines, et surtout, de poursuivre leurs études jusqu’au grade de chercheuse ? Au-delà de l’aspect parfois aride de l’informatique, du génie et des mathématiques qui en fait peut-être fuir certaines, Joelle Pineau pense que les jeunes filles manquent de modèles inspirants de chercheuses qui ont réussi à concilier carrière fructueuse et famille épanouie. Ainsi, les étudiantes hésitent souvent à poursuivre au doctorat, car elles ont l’impression qu’une carrière scientifique entrera en conflit avec leur projet de maternité. Pourtant, pour Joelle Pineau, la recherche peut se conjuguer au féminin. « Le milieu universitaire se prête bien à la conciliation travail-famille en raison de la flexibilité des horaires, témoigne-t-elle. En autant qu’on y met les heures et l’énergie nécessaires pour y arriver, c’est tout à fait faisable ! » La spécialiste en robotique en est la preuve. Sa carrière de chercheuse, de professeure et de codirectrice du Laboratoire raisonnement et apprentissage ne l’a pas empêchée d’avoir… quatre enfants ! Et vice-versa. Son secret ? Se fixer un horaire et s’y tenir !

Ainsi, de 8 h 30 à 16 h 30, la scientifique s’intéresse aux algorithmes d’apprentissage automatique, une série d’opérations mathématiques capables d’émettre des prédictions ou des décisions selon des données captées en temps réel. Son dada, somme toute technique et abstrait, prend tout son sens quand il permet à des personnes à mobilité réduite de se déplacer facilement dans les allées d’un centre commercial achalandé. En effet, avec des collègues de Polytechnique Montréal et de l’École de réadaptation de l’Université de Montréal, Joelle Pineau a équipé un fauteuil roulant de capteurs, de caméras et d’un ordinateur. Ces équipements enregistrent et analysent en temps réel le mouvement des gens et les obstacles à contourner, et les algorithmes de Joelle Pineau rendent le fauteuil « intelligent » : celui-ci apprend de son environnement pour s’adapter, par exemple, au flot des « magasineurs ».

Après sa journée de travail, la scientifique se consacre à sa famille. Si elle a besoin de plus de temps pour boucler un projet, elle retourne à ses algorithmes en soirée, mais jamais avant que sa marmaille ne soit couchée !

Changer l’image de la recherche

Selon Joelle Pineau, pour attirer davantage de filles en recherche, il faut changer le préjugé selon lequel une chercheuse doit passer de longues heures au laboratoire, ce qui ne laisse place à rien d’autre. Il faut aussi montrer qu’en faisant des études dans des domaines de pointe comme l’ingénierie, la robotique ou l’informatique, on peut avoir un impact concret sur la société. « Mais on ne doit pas nécessairement chercher la parité dans tous les domaines, croit-elle. Il faut plutôt s’assurer d’avoir les bonnes structures pour repérer les candidates prometteuses et les soutenir dans leur parcours professionnel et personnel. »


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