Auteur : Agence Science Presse - Maxime Bilodeau
Ciels plus bleus, villes moins bruyantes, épisodes de smog rarissimes : la pandémie a eu du bon pour l’environnement. Toutefois, cela ne signifie pas qu’à la fin de l’année, le bilan sera meilleur pour le climat, rappelle le Détecteur de rumeurs.
La crise sanitaire a rendu possible une réduction historique des émissions de gaz à effet de serre (GES) à l’échelle planétaire. Ralentissement de l’économie mondiale oblige, la demande énergétique a chuté dramatiquement depuis le début du Grand confinement, lisait-on dès la fin d’avril dans un rapport de l’Agence internationale de l’énergie.
Selon les prévisions de cette agence internationale rattachée à l’OCDE, cela aura pour effet de réduire de 8 % les émissions de GES en 2020 par rapport à 2019 — certaines estimations plus conservatrices évoquent plutôt une diminution de l’ordre de 4 à 5,5 %, ce qui serait tout de même sans précédent.
La « disparition » de ces 2,6 gigatonnes de CO2 de l’atmosphère équivaudra aux niveaux d’émissions observés lors des années 2000. Aucun événement n’a provoqué une chute aussi marquée des émissions de GES depuis un siècle, ni la crise financière mondiale de 2008 ni même la Seconde Guerre mondiale.
Réduction de la pollution
Les effets de cette « pause COVID-19 » se sont fait sentir aux quatre coins du globe. À la fin d’avril, on notait que la qualité de l’air s’était améliorée dans neuf grandes métropoles de la planète durant les mesures de confinement. Les baisses d’émissions de particules fines dont le diamètre est inférieur à 2,5 micromètres y étaient de l’ordre de 9 % à 54 %. L’OMS estime que 7 millions de personnes meurent chaque année à cause de l’exposition aux particules fines contenues dans l’air pollué.
À Delhi, en Inde, on observait même une réduction de l’ordre de 60 % entre le 23 mars et le 13 avril. C’est ce qui a contribué à ce que la population locale redécouvre les sommets de l’Himalaya, normalement voilés par le smog.
Dans un autre domaine, une étude canadienne publiée à la mi-mai dans le Journal of the Acoustical Society of America fait état d’une baisse significative de la pollution sonore dans l’océan Pacifique, au large des côtes britanno-colombiennes, entre le 1er janvier et le 1er avril dernier. Ce phénomène est vraisemblablement dû à la réduction du trafic maritime et serait bénéfique pour la santé des mammifères marins du coin.
Inertie climatique
Ces bonnes nouvelles doivent cependant être tempérées. Les GES émis par l’humanité dans les dernières décennies ne sont pas disparus du jour au lendemain. Leur durée de séjour dans l'atmosphère se chiffre plutôt en décennies, en siècles, voire en millénaires. De fait, même l'arrêt net, complet et hautement improbable d'émissions de GES n'empêcherait pas le réchauffement climatique de se poursuivre. En 2010, le NASA Earth Observatory affirmait qu'un tel scénario amènerait tout de la même la planète Terre à se réchauffer de 0,6 degré Celsius d'ici 2100.
Le Breakthrough Institute, un centre de recherche environnementale américain, soutient que les concentrations de GES dans l’atmosphère demeureront pratiquement inchangées en 2020. Avant la pandémie, celles-ci devaient atteindre 414,2 parties par million (PPM), analyse-t-il. Advenant un frein de 5 % des émissions de GES cette année, les concentrations seront plutôt de 414 PPM.
Cette mince différence, si elle se produit, est trop modeste pour influer sur la dynamique du système climatique, conclut le Breakthrough Institute. Il faut rappeler que les concentrations en PPM ne cessent d'augmenter depuis la Révolution industrielle du 19e siècle: elles étaient auparavant sous la barre des 300 ppm. L'Agence américaine des océans et de l’atmosphère estime qu'elles ont augmenté de 1,84 PPM par année en moyenne entre 1979 et 2019.
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Cette réduction historique nous apprend quelque chose sur les efforts qui restent à entreprendre pour combattre la crise climatique.