Auteur : Agence Science Presse
Les articles du Détecteur de rumeurs sont rédigés par des journalistes
scientifiques de l'Agence Science-Presse. Les Fonds de recherche du Québec et
le Bureau de coopération interuniversitaire sont partenaires du Détecteur de rumeurs.
Une étude portant sur les comportements sexuels des lesbiennes qui aurait été réalisée sans en avoir interviewée une seule? Le Détecteur de rumeurs n'a certainement pas besoin ici d’expliquer longuement pourquoi il y a un gros problème.
L'étude existe pourtant bel et bien et, si on se contentait de n'en lire que la conclusion, on pourrait à bon droit froncer les sourcils: les femmes qui développent une attirance sexuelle pour d’autres femmes le feraient… parce que ça excite les hommes. C’est vraiment ce qu’ont conclu les quatre chercheurs en psychologie de l’évolution de l’Université de Nicosie à Chypre (trois hommes et une femme), dans leur articlee paru dans la revue Personality and Individual Differences.
On pourrait certes accorder le bénéfice du doute à cette conclusion si on choisissait de partir du principe que toutes les hypothèses méritent d’être étudiées en science sur un pied d’égalité. Mais ce serait faire abstraction du paragraphe sur la méthodologie de l'étude, qui apparaît plus bas: celle-ci a été menée à partir d'entrevues auprès de 1509 hétérosexuels. Autrement dit, les chercheurs ont fait une étude sur les comportements de femmes homosexuelles sans en interviewer une seule.
Par ailleurs, l’étude a été mise en ligne en mai 2017. Ce qui n’empêche pas qu’elle a récemment déclenché quelques réactions offusquées sur Twitter. Elle avait aussi été descendue en flammes par la blogueuse Rebecca Watson en 2019 (qui venait d’en entendre parler sur Twitter), et par la sociologue Zuleyka Zevallos en 2018. En plus d’être ridiculisée dans le blogue des Annales de la recherche improbable en juin 2017. Et de faire l’objet de quelques articles de presse en 2017.
L’étude semble autrement dit resurgir dans l'algorithme de Twitter à intervalles irréguliers, notait Rebecca Watson, en provoquant chaque fois un nouveau cycle de réactions offusquées, doublées d’un peu d’embarras pour les auteurs et pour quiconque a autorisé cette recherche.
L’astuce du Détecteur de rumeurs
Dans le doute devant une conclusion étonnante, cherchez le paragraphe de l’étude qui décrit l’échantillon —en. d’autres termes, auprès de qui ou de quoi a été menée l’étude.
Comme le Détecteur de rumeurs l’écrivait ici, s’il s’agissait d’une recherche sur un futur médicament, il relèverait de l’évidence qu’une étude n’a pas la même valeur si elle a été menée seulement sur des souris, plutôt que sur des humains. L’équivalent dans le domaine des recherches en psychologie, c’est un groupe de gens tellement peu représentatif qu’il ne permet pas de tirer de conclusions pertinentes.