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Détecteur de rumeurs

Better impact on the climate: imported organic tomato or tomato in a local greenhouse? It depends (French version only)

Les articles du Détecteur de rumeurs sont rédigés par des journalistes
scientifiques de l'Agence Science-Presse. Les Fonds de recherche du Québec et
le Bureau de coopération interuniversitaire sont partenaires du Détecteur de rumeurs.

Auteur : Agence Science Presse - Aurélie Lagueux-Beloin

Si on vit au Québec et qu’on se soucie de son impact sur le climat, vaut-il mieux, en-dehors de l’été, manger une tomate bio du Mexique ou une tomate cultivée sous serre localement? La réponse n’est pas si évidente, constatent le Détecteur de rumeurs et Unpointcinq.

« Pour un même type de tomate, l’empreinte carbone peut changer d’un agriculteur à l’autre et d’une région à l’autre », remarque Dominique Maxime, analyste à Polytechnique Montréal et chercheur au Centre international de référence sur le cycle de vie des produits, procédés et services (CIRAIG). Par exemple, pour un Vancouverois, en Colombie-Britannique, les tomates de serre locales sont meilleures pour le climat puisque le transport des tomates des champs de la Floride —5000 kilomètres en camion— représente les trois quarts de leurs émissions de gaz à effet de serre (GES). À l’opposé, pour un consommateur de Boston, le chauffage d’une serre de tomates au gaz naturel, même si elle est à proximité, fait suffisamment grimper le bilan carbone pour rattraper et même dépasser le transport des tomates de champs du Mexique jusqu’en Nouvelle-Angleterre.

Avec ou sans pesticides ? 

Le mode d’agriculture, avec ou sans pesticides, se répercute aussi sur l’empreinte carbone de la tomate. Faut-il déduire que la production biologique est la solution climatosympathique?

« Pas tout à fait », nuance le chercheur. « Puisque la priorité de l’agriculture biologique n’est pas de produire le meilleur rendement possible, ça peut faire grimper l’empreinte carbone des tomates. » C’est ce qu’ont observé des chercheurs de l’Université du Manitoba dans une méta-analyse regroupant plus de 700 systèmes agricoles et parue en 2017. Les résultats montrent que, bien que les systèmes biologiques utilisent moins d’énergie, ils émettent autant d’émissions de GES que les systèmes conventionnels.

Le bio présente cependant d’autres avantages. « Les agriculteurs biologiques choisis-sent de minimiser leur impact environnemental et pas seulement leurs émissions de GES. Ils choisissent par exemple de cultiver sans pesticides, car ceux-ci augmentent la toxicité de l’eau et diminuent la biodiversité », souligne Dominique Maxime.

Mais les pesticides produisent une portion minime de GES. Le bio n’est donc pas nécessairement la meilleure solution si on se focalise sur le climat. L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) recommande toutefois aux fermiers de s’y mettre, car elle considère l’agriculture biologique comme « une méthode de culture avantageuse, avec un potentiel considérable pour atténuer le changement climatique et s’y adapter ».

Le coût du chauffage

Le climat québécois raccourcit notre saison maraîchère par rapport à celle du Mexique. Grâce aux serres, les producteurs de tomates d’ici peuvent se protéger du froid et même compenser le manque de lumière. Mais il y a un coût: une serre, c’est énergivore !

L’impact climatique des tomates de serre dépend donc en grande partie du système de chauffage utilisé. Au Québec, plus de la moitié des producteurs de tomates chauffent leurs serres au mazout, un combustible fossile au lourd bilan GES, utilisé parce qu’il ne nécessite qu’un faible investissement en équipement.

Or, les tomates de serre représentent plus de 70 % de la production québécoise de tomates. Chaque Québécois en consomme plus de 5 kg par an.

D’après un rapport de 2017 de l’Institut de recherche et de développement en agroenvironnement (IRDA), l’empreinte carbone des tomates de serre québécoises devrait diminuer dans les prochaines années, grâce à la transition vers des systèmes de chauffage carboneutres, comme la biomasse de résidus forestiers ou le biogaz.

Professeur de physique à l’Université de Montréal, Normand Mousseau émet tout de même un bémol : « Même si on réalise une économie de GES de 30 % en remplaçant un système au mazout par du gaz naturel, après ça, on frappe un mur, parce qu’on ne peut pas réduire plus! »

Verdict

Incertain. Entre la tomate qui pousse sous serre au Québec ou celle qui vient du Mexique, difficile de dire laquelle est la plus dommageable pour le climat. Prioriser les tomates locales en été est la solution idéale, mais en hiver, chacune des deux a ses avantages et ses inconvénients.